Pour éviter d’être la risée de sa famille, F. Ndiaye avait, après son accouchement dans la nuit du 12 au 13 novembre 2017, étranglé son bébé et l’enfermé dans une valise. Jugée, mardi 16 février 2021 pour infanticide, elle encourt cinq ans de réclusion criminelle.
Alors qu’elle avait quitté sa Louga natale, pour venir gagner sa vie à Dakar, F. Ndiaye a vu tous ses espoirs brisés par une grossesse. Une grossesse devenue indésirable puisque son copain avait refusé d’endosser la paternité. Tenaillée par la crainte de se faire bannir par sa famille restée au village, la jeune fille de 19 ans avait alors préféré se débarrasser de l’enfant à la naissance.
Selon l’accusation, après avoir senti les premières contractions, dans la nuit du 12 au 13 novembre 2017, la domestique s’est mise devant sa chambre de 21h à 23h. Lorsque ses voisines se sont enquises de son état, vu qu’elle se tordait de douleur, elle leur a fait croire qu’elle souffrait de mal de dent, avant de leur demander d’aller se coucher.
Tard dans la nuit, elle a accouché seule dans les toilettes. Après la délivrance, elle a étranglé le nouveau-né, l’a enveloppé dans un pagne et a mis le corps dans une valise fermée ensuite. Mais, le lendemain, elle a été trahie par sa chute dans les toilettes ainsi que le sang qui dégoulinait de ses parties intimes.
Interrogée par ses voisines, elle leur a dit qu’elle avait fait une fausse couche. Puisqu’elle n’était pas en mesure d’indiquer où se trouvait le fœtus, elle a été dénoncée à la police.
Face aux policiers, elle a laissé entendre qu’elle avait jeté le bébé dans la fosse septique, or, il se trouve que l’entrée de celle-ci est tellement étroite qu’on ne peut pas y introduire un mouchoir. Acculée, elle a fini par indiquer où se trouvait le cadavre, mais s’est empressée de dire qu’elle a accouché d’un mort-né.
L’accusée a adopté le même système de défense à la barre de la chambre criminelle de Dakar. Elle a reconnu avoir certes caché la grossesse et mis le nouveau-né dans une valise, mais, elle ne l’a pas tué, puisqu’elle n’en a même pas le cœur. «Je ne l’ai pas étranglé. Je l’ai juste mis dans la valise pendant des heures », s’est-elle défendu.
Mais pour le parquet, le déshonneur a poussé l’accusée à étrangler son enfant avec sa main ou son pagne. Il a requis cinq ans de réclusion criminelle.
Me Tandian estime que « rien dans le dossier ne permet d’affirmer de manière formelle qu’elle a tué l’enfant » et qu’en l’absence d’une preuve formelle, l’infanticide doit être disqualifié en homicide involontaire.
Son confrère Me Dialy Kane pense qu’il y a une « culpabilité certaine » et a sollicité la compréhension et la clémence des juges. Car, dit-il, « l’infanticide, c’est l’infraction des femmes pauvres qui n’ont pas les moyens d’interrompre leur grossesse. Il s’y ajoute que c’est toujours les hommes qui sont derrière en refusant d’endosser leur responsabilité. Tant que les hommes ne seront pas inquiétés, les femmes continueront à souffrir », a-t-il plaidé.
L’accusée, en pleurs, a demandé pardon lorsqu’elle a été invitée à dire son dernier mot.
L’affaire sera vidée le 2 mars prochain.